Semaine Climat & Énergie 2025 : Les collectivités territoriales au cœur de la résilience climatique
La quatrième édition de la Semaine Énergie-Climat, co-organisée par ENDA Énergie, OXFAM, Natural Justice, Ford Foundation, CDKN, SSN, AACJ, GIZ, ACF et le Gouvernement du Sénégal, a démarré ce lundi 21 juillet 2025 à Dakar. Placée sous le thème : « Réinventons nos territoires pour faire face à l’urgence climatique dans une perspective de souveraineté économique en Afrique », cette édition se veut une impulsion stratégique dans la territorialisation de l’action climatique en Afrique, en général.
Les discours introductifs ont posé un cadrage politique solide. M. Emmanuel Seck, Directeur Exécutif d’ENDA Énergie, a insisté sur la nécessité d’ancrer les politiques climatiques dans les dynamiques territoriales, en soulignant que la CDN 3.0 ne pourra être effective que si elle est co-construite avec les Collectivités locales. Mme Khar Ndiaye, Directrice d’OXFAM Sénégal, a rappelé que l’Afrique paie un lourd tribut climatique qu’elle n’a pas causé, appelant à une meilleure prévisibilité et accessibilité des financements climat. Mme Sokhna Dié Ka, Directrice du Hub Sénégal de Natural Justice, a renforcé cet appel en insistant sur la reconnaissance des savoirs endogènes et la nécessité d’inclure les communautés vulnérables dans tous les processus décisionnels.
Le Ministre de l’Environnement et de la Transition Écologique, Pr Daouda Ngom, a souligné que cette Semaine s’inscrit dans la continuité du lancement officiel du processus de révision de la CDN, le 7 juillet dernier. Il a mis l’accent sur l’importance de la territorialisation comme levier de transformation, en interpellant les participants : « Nos territoires sont-ils prêts à porter l’ambition climatique du Sénégal ? »
Le second temps fort de cette matinée a été ponctué par un panel de haut niveau sur le rôle structurant des Collectivités dans la lutte contre le changement climatique. Les interventions ont convergé vers une même conclusion : l’architecture institutionnelle actuelle est insuffisamment outillée pour porter efficacement les plans climat locaux. M. Maguette Sène, Maire de Malicounda, a plaidé pour la mise en place d’un fonds climat local et une obligation légale de disposer de plans climat territoriaux. Mme Khadidiatou Mayécor Diouf, maire de Golf Sud, a insisté sur la nécessité d’une fiscalité verte et d’une participation citoyenne accrue, dans le cadre de la réforme en cours de l’Acte 4 de la Décentralisation.
Des représentants de la société civile tels que Mme Aïcha Dramé (ENDA ECOPOP) et M. Ousseynou Seck (IED Afrique), ont mis en lumière le décalage entre les ambitions climatiques et les capacités techniques et financières des Collectivités, en particulier en matière de mobilisation de financements climat, de nomenclature budgétaire adaptée et d’ingénierie territoriale. Le modèle de Décentralisation des Financements Climat (DFC) expérimenté à Fatick a été cité comme une bonne pratique à capitaliser.
Une session parallèle a permis d’explorer en profondeur les défis spécifiques aux zones insulaires et côtières, particulièrement vulnérables à l’érosion, à la salinisation et à la dégradation des écosystèmes comme les mangroves. Des chercheurs comme Pr Boubacar Fall et Cheikh Sadibou Dia ont démontré que ces zones requièrent des approches de gouvernance différenciées, fondées sur la culture locale, la concertation inter-villageoise, et la mise en place de cadres juridiques et réglementaires spécifiques. La création d’un réseau national des îles et la mise en œuvre de solutions basées sur la nature, telles que le reboisement et l’interdiction stricte de l’extraction de sable, ont été largement soutenues.
Un second panel interactif a approfondi les conditions de succès de la CDN 3.0, en soulignant l’urgence d’aligner les politiques climatiques nationales et territoriales. Mme Fatma Niang (METE), M. Ousseynou NDione, Mme NDeye Sagne (PACASEN) et plusieurs élus locaux ont insisté sur la nécessité d’une méthodologie commune, de la création de points focaux climat dans chaque collectivité, et de mécanismes de suivi-évaluation intégrés.
Le principe de subsidiarité a été au cœur des échanges : les collectivités ne doivent plus être de simples réceptacles, mais des acteurs structurants de la mise en œuvre climatique, avec des ressources propres, une reconnaissance institutionnelle forte et une capacité à capitaliser leurs acquis.
La masterclass animée par El Hadj Ibrahima Ndiaye, représentant de la Ville de Dakar, a mis en lumière l’importance des modèles de partenariat multipartites, illustrés par l’adhésion de Dakar au réseau C40 Cities. Il a présenté les projets climatiques structurants de Dakar, dont l’accompagnement à la planification de la Ville de Rufisque, démontrant ainsi la pertinence de coopérations intercommunales pour mutualiser les ressources et renforcer les capacités.
La première journée s’est conclue sur une dynamique constructive et réaliste : la transition climatique ne se fera pas sans une refonte des outils de gouvernance locale. La territorialisation ne doit pas être seulement un mot d’ordre politique, mais un processus soutenu par des mécanismes financiers adaptés, des capacités renforcées et un cadre légal cohérent.
Alors que le Sénégal s’engage dans une nouvelle phase de sa planification climatique avec la CDN 3.0, cette journée a permis de réaffirmer que les territoires sont le point d’ancrage de la résilience climatique. Les Collectivités territoriales doivent en être les architectes pleinement reconnus et appuyés.